vendredi 10 avril 2015

Libre d'apprendre BLOG18 - La valeur du jeu 3 : Comment les enfants se confrontent aux défis de la vie

La valeur du jeu 3 : Comment les enfants se confrontent aux défis de la vie

Même dans le pire environnement, les camps de la mort Nazis, les enfants jouaient.


L'extraordinaire pulsion des enfants à jouer n'est pas là pour leur fournir des temps de récréation et de loisirs. Elle est là pour une raison bien plus sérieuse que cela. Elle est là pour les aider à survivre. À travers l'histoire humaine et la préhistoire, le jeu a été le moyen principal de l'enfant pour acquérir les connaissances, les valeurs et les aptitudes dont ils avaient besoin pour survivre à l'intérieure de leur culture. Les enfants ne jouent pas pour éviter les réalités de la vie, ils jouent aux réalités de la vie. En faisant cela ils arrivent à saisir ces réalités d'une manière physique, intellectuelle et émotionnelle.

Dans les essais précédent de ce blog, j'ai décris comment l'enfant joue à s'exercer et à construire ses capacités pour le langage, le raisonnement, la locomotion, la construction de choses et à entrer en relation avec les autres (voir particulièrement le texte sur la variété de jeux). J'ai décris ici le jeu de manières qui ne contredisent pas les images joyeuses que nous avons des enfants qui jouent à leurs activités préférées dans des environnements sains. Mais le jeu n'est pas simplement là pour s'adapter à un environnement sain. Le jeu aide l'enfant à se confronter et interpréter les horreurs de leur monde et du notre, lorsqu'ils sont au contact de ces horreurs.

Nous aimerions penser aux enfants comme des êtres doux et innocent. Dans un monde idéal, où les adultes seraient entièrement doux et innocents, les enfants pourraient l'être. Mais le monde n'est pas idéal, et les enfants qui grandissent protégé des réalités de l'environnement, ils doivent éventuellement faire leur chemin, seraient mal préparé pour cet environnement.

Il n'y a rien d'étonnant à ce que l'enfant résistent à l'accolade protectrice bienveillante des adultes, ils combattent la détention qui a pour objectif de les garder sur un terrain idyllique pour s'aventurer à l'extérieur, toutefois et quand ils le peuvent, ils font l'expérience du monde réel autour d'eux et l'incorpore à leur jeu. Ils savent bien mieux que nous ce qui est bon pour eux.

L'évidence de cela la plus dramatique que je connaisse concerne les enfants qui ont une pulsion à embrasser les pires horreurs de leur environnement à travers le jeu est trouvé dans un livre remarquable de George Eisen, publié il y a vingt ans, qui s'intitule, « Les enfants et le jeu pendant l'holocaust ». On y trouve ici deux concepts qui se trouvent aux deux extrémités du spectre émotionnel de chacun, l'holocaust nazi et le jeu de l'enfant.

Il est choquant de voir les deux, l'un à côté de l'autre dans le titre d'Eisen. Et pourtant, comme nous l'explique Eisen à travers le livre, les enfants enfermés dans les ghettos et les camps de concentration Nazie ont joué, du moins brièvement, jusqu'à ce qu'ils soient assassinés. Ils ont joué non pas parce qu'ils étaient inconscients des horreurs qui les entouraient. Ils n'ont pas utilisé le jeu comme un moyen de nier ces horreurs ou de détourner leurs attentions d'eux-même.

Mais plutôt, ils ont joué pour que cela les aide à comprendre, à confronter et à un certain niveau, faire face de manière efficace à ces horreurs. La preuve d'Eisen vient de journaux et de témoignage de survivants. Dans les ghettos, la première étape de concentration avant d'être envoyé dans des camps de travail et d'extermination, les adultes ont tenté de préserver leurs enfants en les faisant jouer aux mêmes petits jeux innocents qu'ils avaient l'habitude avant les camps, mais les enfants par eux-même ont joué à des jeux qui s'adaptaient à leur milieu.

Ils jouaient à des jeux de guerre, ils jouaient, à « l'explosion de bunkers », au « massacre », au « ramassage de vêtement sur les morts » et à des jeux de résistance. À Vilna, les enfants juifs jouaient aux « Juifs et à la Gestapo » dans lesquels les Juifs finissent par vaincre leurs bourreaux et les battent avec leurs propres fusils (des bâtons).

Même dans les camps d'extermination, les enfants qui étaient encore en bonne santé pour se déplacer, jouaient. Dans un camp ils jouaient un jeu appelé « chatouiller le corps ». À Auschwitz-Birkenau ils se mettaient au défi les uns les autres de toucher les clôtures électriques. Ils jouaient à « la chambre à gaz », un jeu dans lequel ils lançaient des cailloux dans une fosse et imitaient les cris de personnes mourantes.

Ils inventèrent un jeu appelé klepsi-klepsi, un terme commun pour voler, qui imitait l'appel quotidien dans le camp. Un partenaire de jeu avait les yeux bandés, et les uns les autres me mirent devant lui et le frappaient fort au visage, et ensuite, lorsque le bandeau lui fut enlevé, celui qui a été frappé devait deviner, à partir des expressions faciales ou d'autres preuves, qui sont ceux qui l'avaient frappé.

Pour survivre à Auschwitz, on devait être un expert au mensonge, par exemple, pour voler du pain ou pour connaître des plans d'évasions ou de résistances sans se dévoiler. Klepsi-klepsi semble être une pratique de cette aptitude.

Dans le jeu, que ce soit ces jeux doux que nous aimons imaginer ou le jeu décrit par Eisen, l'enfant amène les réalités de leur monde dans le contexte fictionnel, ou il est sécurisant de regarder ces réalités dans les yeux, de les confronter, de les expérimenter et de les mettre en pratique comme un moyen de leur faire face. Certaines personnes pensent que les jeux violent crée des adultes violent, mais en réalité, c'est l'opposé qui est vrai. Les adultes violents amènent les enfants à avoir besoin de jeux violents pour faire face à leur réalité.

La violence dans le monde adulte amène naturellement les enfants à jouer à la violence. Comment pourraient-ils sinon se préparer émotionnellement, intellectuellement et physiquement pour cette réalité ? Il est faux de penser que l'on réforme le monde, le futur en contrôlant le jeu des enfants et en contrôlant ce qu'ils apprennent. Si nous voulons reformer le monde, nous devons réformer le monde et les enfants suivront. Les enfants doivent se préparer, et se prépareront eux-même pour le monde réel dans lequel ils doivent faire tout leur possible pour survivre. Essayons de faire de ce monde, en réalité et non pas dans l'imaginaire, aussi joyeux qu'il soit possible.


Publié le 16 Décembre 2008 par Peter Gray, Traduit le 10 Avril 2015 par Michaël Seyne

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